Le peintre officiel Albert Besnard, tombé dans l’oubli après sa mort en 1934, était apprécié de Paul Poujaud qui allait voir ses expositions dans la Galerie Petit. La notice du Dictionnaire Carriat mentionne le peintre. Poujaud n’en parle pas dans ses lettres à Dukas. Mais il en appréciait la diversité, au-delà de l’image conventionnelle qu’un tel peintre pouvait avoir.
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Il a eu droit à de nombreux honneurs, et des funérailles nationales (le premier peintre à en « bénéficier »).
Un thème peu connu d’Albert Besnard est l’inspiration morbide développée dans certaines eaux fortes, notamment la série sur la danse macabre (Elle) réalisée pour le baron Joseph Vitta en 1900 et rééditée en 1921. On y voit cette diversité et la liberté de l’artiste.
Le plus souvent, c’est la nature qui l’inspire et il est proche des impressionnistes et soucieux de faire une œuvre personnelle. Il a eu droit à une exposition en 2016 lui rendant cette justice (Petit Palais, Albert Besnard. Modernités Belle Époque,). Edgar Degas, proche d’Albert Besnard, tout en le critiquant, l’appelait le « pompier qui a pris feu ». Une contradiction ? Degas faisait partie des peintres avec qui Poujaud dialoguait, comme Maurice Denis lui aussi proche de Besnard.
Dans un tableau comme La famille de l’artiste, œuvre attendue du peintre « officiel », Besnard (le maître est bien là, souverain) veille à marquer le lieu (Talloires, près du lac d’Annecy), montrant ainsi cette sensibilité où la nature est présente.
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Pour la décoration de l’hôtel particulier d’Henry Lerolle avenue Duquesne, il utilise le lac et sa vie, lui donnant, dans un lumineux vitrail, une présence bouleversante :
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On peut se concentrer sur un détail, le peintre sait exprimer la force de la
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nature qui l’entoure.
Besnard honore Lerolle et la musique à travers lui.
C’est toute une société où peinture et musique sont mêlées.
Lerolle avait écrit : « On peut vivre sans peinture, mais certainement pas sans musique. » L’épouse d’Henry Lerolle est une des sœurs Escudier (Madeleine), sa belle-sœur Jeanne est l’épouse d’Ernest Chausson. Dans le tableau de Lerolle La répétition à l’orgue (Metropolitan Museum of Art, New York),
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le monde musical est là : Ernest chausson joue, Marie Escudier (Mme Arthur Fontaine) chante, Jeanne Escudier a les partitions sur les genoux, Claude Debussy écoute, tout à gauche, dans le noir. Poujaud n’est pas loin.
Maurice Denis écrit une plaquette sur Lerolle, saluant aussi les musiciens et « l’infaillible Paul Poujaud qu’il est impossible de séparer de ce groupe de musiciens, Poujaud, le meilleur critique de son temps, qui n’a jamais publié une ligne, mais dont les jugement passionnés, étincelants, décisifs, survivront au rire sonore et à la fantaisie des mots. »
La proximité entre Besnard et Lerolle apparaît dans de nombreux tableaux, notamment celui ou la femme de Lerolle (Madeleine Escudier) est avec sa fille Yvonne :
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La musique est constante ; Besnard est proche de Chausson. Il le peint avec sa femme (Jeanne Escudier) au piano. Une gravure en est faite avec leurs noms puis, pour un autre tirage, avec le titre Au piano. Il y avait entre Paul Poujaud et Ernest Chausson un lien très fort dont cette gravure était un élément.
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[ On trouvera sur Gallica le livre de Camille Mauclair, Albert Besnard. L’homme et l’œuvre (1914) et la plaquette de Maurice Denis, Henry Lerolle et ses amis (1932) ; la notice Wikipédia sur Besnard est utile.
Les œuvres reproduites ont été « empruntées » au Musée d’Orsay, au Musée des Arts décoratifs (le vitrail), au Met, au Cleveland Museum of Art et à la Fondation Cassanea.
Sur Elle, on lira la notice du Musée des Beaux Arts du Canada à Ottawa et on verra de bonnes reproductions sur le site Giquello : https://www.giquelloetassocies.fr/lot/96925/10236453-albert-besnard-1849-1934-elle-1900-1901-suite-complete-de-26 ]