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23 octobre 2011 7 23 /10 /octobre /2011 11:26

 

Sur la couverture de Musica n° 24 de septembre 1904,

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nous voyons Charles Bordes et quelques choristes attendant devant l'orangerie du château de Fontainebleau. Il s'agit d'un concert de musique de la Renaissance donné par les Chanteurs de St Gervais le 28 juillet 1904.

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Le long article de Félicien Grétry décrit ce travail. Les choristes ont présenté deux programmes : musique sacrée dans la chapelle haute de St Saturnin, musique profane dans la galerie Henri II.

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Les concerts avaient un but philanthropique car, sous l'égide de la Croix-Rouge, une partie des bénéfices devaient aller aux victimes de la guerre russo-japonaise.

Les noms de quelques contributeurs sont mentionnés ; c'est le monde de Proust : la baronne de Baye, la comtesse Maurice de Cossé-Brissac, la générale baronne Kirgener de Planta etc… et même il ne manque pas la comtesse Louis de Montesquiou. "Ce fut d'un charme inoubliable", nous dit-on, "où les grâces ressuscitées du passé faisaient un contraste émouvant avec les élégances modernes dont se composait l'auditoire". 

L'article souligne la qualité musicale, il parle de "piété esthétique", intéressante expression qui fait ressortir le caractère spirituel de l'œuvre d'art, qu'elle soit religieuse ou pas. La perfection de la musique ancienne est "propre à émouvoir ceux qui ne recherchent que la joie harmonieuse de leurs sens".

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Le lien entre cette musique savante et la musique populaire est souligné. Ce fut, nous le savons, l'objet de l'étude de Charles Bordes. L'auteur de l'article dit clairement que la musique savante s'adresse aussi au peuple : "elle porte en soi la solution de la véritable musique populaire." Mais il voit bien la contradiction, cette différence à caractère social entre les auditeurs de Fontainebleau et ceux qui doivent aussi l'écouter. Voici comment Félicien Grétry termine l'article : "Et si ces pensées ont pu vous être suggérées l'autre jour au milieu de belles toilettes quelque peu rigides et empesées, c'est que, dans un coin, à l'ombre d'un pilier complaisant, quelque petit paysan écoutait, la bouche entr'ouverte, les yeux pleins de joie, les rythmes allègres, les entrelacs lumineux des : Allons gay gay bergères de Costeley ou les grâces piquantes de Joli-jeu de Clément Jannequin."

On peut trouver maladroite et condescendante cette opposition, mais ne montre-t-elle pas la voie que Charles Bordes a voulu ouvrir, loin de l'élite, celle d'un art pour tous ? Sur le plan social, c'est le paradoxe et la difficulté de Charles Bordes. Cette "élite", souvent traditionaliste, il la côtoyait sans cesse, à la Schola ou au cours de ses concerts, comme le montre bien l'article de Félicien Grétry. C'était le prix à payer pour que vive la musique.

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